AISLF

Événements AISLF en 2010

AISLF- La sociologie par l’image

20 juin 2010

Un appel à communication est lancé pour un colloque de sociologie visuelle
organisé par le GdR oPus et le CR18 de l’AISLF sur « La sociologie par l’image ». Ce colloque aura lieu les
28 et 29 octobre 2010 à Bruxelles (Belgique).

Université libre de Bruxelles

Date limite des propositions : 20 juin 2010

Texte d’appel

Précisons d’emblée que la sociologie visuelle se veut une manière de faire de la sociologie par l’image plutôt qu’une sociologie ou une sémiologie de l’image, une expérience du monde à travers l’image plutôt qu’une analyse socio-sémiologique du monde à travers les images manufacturées par les professionnels de la culture, les industries de l’information et de la communication, l’artiste, le photographe ou le cinéaste amateur. La sociologie visuelle est un merveilleux instrument heuristique qui nous rappelle, contre toute tentation de fétichiser la technique, que le cadrage et le montage sont des opérations constitutives de toute appréhension sociologique de la réalité sociale. En ce sens, on pourrait presque dire que la sociologie visuelle relève d’une pédagogie autant que d’une sociologie du regard. En outre, la sociologie visuelle constitue un outil épistémologique qui interroge de manière réflexive et expérimentale la pratique sociologique elle-même. La mise en forme de la réalité qu’opère le regard de l’observateur est toujours une opération qui engage l’observateur comme sujet de son objet d’étude, et le regard des autres, dans le mouvement processuel et intersubjectif de construction de la réalité, garantit à sa vision d’autres angles de vues auxquels il lui faut se confronter pour assurer à son discours une validité épistémologique.

Cette discipline du regard — sa « déconstruction » ou sa « dénaturalisation » — conduit aussi à prêter attention aux événements, formes, micro-rituels de la vie ordinaire. L’anthropologue entretient sans doute, pour sa part, un rapport plus décrispé à l’égard du narratif (comme l’atteste la pratique généralisée des journaux tenus par les ethnologues voyageurs) comme des méthodes qualitatives d’enregistrement qui viennent soutenir et prolonger son activité d’observation. Ceci explique du reste l’avance considérable prise par l’anthropologie visuelle (qui a ses lettres de noblesse au sein même de la discipline avec des auteurs comme Margaret Mead et Gregory Bateson, Jean Rouch ou Luc de Heusch, voire Pierre Bourdieu lui-même, à une époque où il se définissait autant comme anthropologue que comme sociologue d’ailleurs) sur la sociologie visuelle dont la tradition demeure (à l’exception de quelques jalons certes marquants, tel Chronique d’un été de Jean Rouch et Edgar Morin) majoritairement extérieure à la discipline, à savoir celle du cinéma ou de la photographie sociales (songeons aux cinéastes Henri Storck, Raymond Depardon, Johan Van der Keuken, Frederick Wiseman ou aux photographes sociaux tels quel Jacob Riis, Lewis Hine, August Sander ou Walker Evans, entre autres). D’où une familiarité entre le travail de la sociologie visuelle et le cinéma ou la photographie documentaires. Proximité de méthode et d’objet, mais qui pose précisément question au sociologue sur le plan épistémologique pour garantir la qualité scientifique de ses investigations.

Le respect de la spécificité et de l’intégrité de la démarche sociologique dans la sociologie visuelle mérite toutefois qu’on s’interroge sur les règles et les critères méthodologiques susceptibles de distinguer cette discipline d’une simple variante du documentaire social. La question revient à se demander dans quelle mesure et à quelles conditions on peut penser sociologiquement en image et par l’image, sans verser dans le commentaire social ou le reportage journalistique, ni réduire l’usage de l’image à un simple rôle d’illustration de thèses sociologiques élaborées par ailleurs suivant des règles logiques d’argumentation, des enquêtes par questionnaire standardisé ou des entretiens. Au-delà de la méfiance séculaire que l’image continue à susciter auprès des sociologues formés à la philosophie, l’enjeu de la sociologie visuelle consiste donc à réserver à pensée visuelle un rôle argumentatif aussi important que celui qu’il trouve dans le documentaire tout en forgeant des règles de la méthode qui permettent à l’image sociologique de ne pas être cantonnée au document qui appellerait ou illustrerait son propre commentaire sociologique.

Nous nous proposons de compléter ce premier volet de notre problématique par l’examen de trois questions corollaires, de sorte que vos propositions de communication puissent s’inscrire dans l’un ou l’autre des quatre registres suivants :

1° Quelles règles de la méthode pour la sociologie visuelle ? : théories et pratiques de la sociologie par l’image et production d’images sociologiques.
2° Reflets dans un œil de sociologue : statut et usages du visuel en sociologie ou la sociologie par l’image.
3° Petits arrangements avec le réel : rapports de la sociologie visuelle et du cinéma-vérité, du cinéma réaliste et social, de la photographie sociale et du documentaire avec la réalité sociale.
4° De l’autre côté du miroir : quand le sociologue se fait artiste visuel ou cinéaste et quand les artistes et les cinéastes se font sociologues.

Ce colloque sera l’occasion de dresser un inventaire raisonné et de retracer, d’établir et de retirer les enseignements, tant épistémologiques que propédeutiques, des méthodes visuelles en sociologie dont la tradition est certes avérée mais dont l’inscription et la reconnaissance institutionnelles demeurent encore très marginales dans l’espace académique francophone où les sociologues tentés par ces pratiques sont presque systématiquement renvoyés vers les départements de journalisme, de communication ou de cinéma. Placées sous le double parrainage scientifique de Howard Becker et de Claude Javeau qui n’ont eu de cesse de s’intéresser avec la plus extrême rigueur et le plus grand respect aux objets comme aux abords sociologiques les moins conventionnels — parmi lesquels l’image et la photographie figurent en bonne place —, les communications et les échanges de vues, qui seront consignés dans un numéro spécial de la Revue de l’Institut de sociologie, pourraient donc également nourrir l’ambition de fédérer et de structurer le réseau de chercheurs et de laboratoires œuvrant dans ce secteur et, pourquoi pas, à l’instar du fameux colloque de sociologie de l’art de Marseille en 1985, d’offrir à cette manière inventive, féconde et encore largement inédite de faire de la sociologie, un nouveau départ avec une visibilité et une légitimité accrue.

Comité scientifique

Howard Becker, André Ducret, Jean-Pierre Esquenazi, Laurent Fleury, Florent Gaudez, Claude Javeau, Mary Léontsini, Jan Marontate, Bruno Péquignot, Réjane Vallée, Daniel Vander Gucht.

Nous vous invitons dès lors à soumettre, vos propositions de communication (présentation orale de 20 à 30 minutes accompagnée ou non de projections), sous la forme d’un texte de 3000 à 5000 signes au format word qui présentera les lignes de force de votre intervention et qui en soulignera l’intérêt et l’originalité. Nous vous demandons encore de joindre à votre proposition une courte notice biographique vous présentant ainsi qu’une liste succinte de vos publications dans le domaine de la sociologie visuelle, le cas échéant. Vos propositions seront ensuite soumises à notre comité scientifique international et vous aurez une réponse de notre part avant le 10 juillet 2010.

Envoi des propositions de communication
par mail à danielvandergucht@yahoo.fr, avant le 20 juin 2010

Daniel Vander Gucht
Directeur du Groupe de recherche en sociologie de l’art et de la culture
Directeur de la Revue de l’Institut de sociologie
Université libre de Bruxelles - CP 124 Institut de sociologie
44 avenue Jeanne, 14e étage - bureau 133, B-1050 Bruxelles, Belgique


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