Gora Mbodj était dans les années 1980 à Toulouse une figure du département de sociologie (à l’époque « Département de sciences sociales » puis « Institut de sciences sociales ») que l’on ne pouvait ignorer : déjà titulaire (depuis 1981) d’une thèse de troisième cycle en sciences de l’éducation obtenue sous la direction du psychopédagogue Louis Not, il était un assistant en sociologie toujours de bonne humeur, bon camarade et bon vivant. Raymond Ledrut, créateur du département et du centre de recherches en sociologie, ayant pris sa retraite en 1982, c’est Jean-Michel Berthelot qui lui succède à la tête du département et du laboratoire et qui va dans un premier temps reproduire le mode de « gouvernance » patronal en cours à l’époque (recrutement des enseignants et des chercheurs, gestion des carrières). C’est donc lui qui recruta Gora Mbodj comme assistant, marquant le début d’une relation très proche entre les deux hommes. Celle-ci se traduisit par l’inscription de Gora en thèse d’État dans le courant de « sociologie du corps » fortement développé à ce moment-là par Jean-Michel Berthelot et par la soutenance de sa thèse en 1987. Gora ne manquait pas de rappeler qu’il avait été professeur d’éducation physique dans une première vie et qu’il était tout indiqué pour travailler une sociologie du corps.
Il s’était installé avec son épouse Aïda Diallo à Toulouse avec l’intention d’y rester longtemps voire définitivement et c’est dans cette ville que sont nés deux de ses quatre enfants (ceux du milieu).
Mais en 1990, après la suppression en 1968 de l’enseignement de la sociologie à l’université de Dakar par le président Léopold Sédar Senghor, la jeune université de Saint-Louis au Sénégal décida, à son ouverture, de recréer une licence de sociologie. Gora Mbodj fut appelé pour être avec quelques autres les promoteurs et les maîtres d’œuvres du projet de cette licence de sociologie. Il quitta donc Toulouse cette année-là et eut par la suite une belle carrière académique à Saint-Louis, non loin de sa ville natale de Dagana (dont il parlait souvent, en rappelant qu’il était issu d’une lignée royale). Il soulignait volontiers qu’il avait volontairement abandonné une carrière académique en France pour rejoindre son pays et participer à la reconstruction d’une filière académique en sociologie. C’était l’une des ses fiertés.
J’ai retrouvé Gora à mon arrivée à l’AISLF en tant que secrétaire générale adjointe en 2000, puisqu’il a été élu membre du Bureau de l’association de 2000 à 2008. Il a été à l’origine du premier colloque de l’AISLF au Sénégal en 2002, à Saint-Louis, qui a marqué les esprits, et collaboré à un second en 2007 à Dakar. Deux colloques importants pour la sociologie sénégalaise.
Merci à Patricia Vannier et à Monique Membrado pour leur aide.
Odile SAINT RAYMOND
Secrétaire générale adjointe de l’AISLF de 2000 à 2016